La population de la vallée

LES SERFS

La plupart des habitants de la vallée sont des serfs, qui appartiennent à un seigneur. Celui-ci applique sa propre loi, orale, en son fief, et peut exiger de ses serfs n'importe quel besogne ou impôt. D'une manière générale, ils doivent travailler une ou deux journées par semaine dans ses champs, lui donner une portion de leur récolte, et payer (souvent en nature) certains "privilèges" comme : faire brouter leurs porcs dans les bois de leur maître, se marier, hériter, ...
Ils ont aussi des devoirs envers l'Eglise, notamment celui de payer la dîme (un dixième de leurs récoltes).
Méprisés par leurs maîtres, qui les considèrent comme des êtres insignifiants, sans cervelle, à peine plus intelligents que des animaux, les serfs ne sont pourtant pas aussi "bêtes" que beaucoup le pensent. Bien qu'ils n'aient aucune éducation, ils sont très compétents dans leur travail et, ne connaissant pas grand chose au monde, arrivent parfois à vivre heureux.
Une infime partie de la classe sociale inférieure est composée d'hommes libres. Ils payent un loyer pour les terres qu'ils cultivent, et la dîme pour leur salut, mais ont le droit de se déplacer librement, ne peuvent être achetés ni vendus, et ne doivent rien à personne s'ils décident de se marier. Certains sont aussi pauvres que les serfs, alors que d'autres sont plus aisés.
Les paysans ont le plus souvent une vie courte et rude, dans de sordides huttes exposées à tous les vents, composées d'une seule pièce que partagent toute la famille et les animaux. La médecine n'en est qu'à ses balbutiements, si bien que seuls les plus forts survivent. Les femmes meurent trop souvent en couches et la mortalité infantile est très importante. De plus, le travail, et surtout les récoltes (blé, avoine, seigle, olives et raisin pour le vin) ne sont pas répartis équitablement tout au long de l'année. certains hivers, c'est la disette, voire la famine.

LA NOBLESSE

Les nobles du Val des Bois vivent un peu plus longtemps et surtout plus confortablement que le commun des mortels. Certains sont au service d'autres seigneurs plus puissants à qui ils doivent allégeance. Le baron d'Uverre, par exemple, est le suzerain de quarante chevaliers, quoi qu'il soit lui-même vassal du comte Raymond de Saint-Gilles.
Le statut des nobles ne dépend pas seulement de la possession de terres. Leurs responsabilités et leurs droits sont définis par des traités appelés convenientiae, remplaçant l'acte d'hommage. Ces pactent fixent les relations entre vassal et suzerain : tous deux se doivent mutuellement assistance, mais c'est plutôt le suzerain qui en tire les bénéfices.
Les seigneurs administrent la justice suivant leur bon plaisir, collectent les impôts et font entretenir routes et ponts. Leur richesse repose sur leurs terres et le travail de leurs serfs. Bien qu'ils exploitent ces derniers, ils en assurent aussi la protection.

LE CLERGE

L'Eglise est très impliquée dans le système féodal du Val des Bois. Le clergé local prêche que la noblesse doit être obéie car "elle fait respecter les lois édictées par Dieu". Il possède de nombreux domaines et exerce son pouvoir en véritable suzerain. Les évêques sont d'ailleurs également membres de la noblesse et ont donc tout intérêt à maintenir l'ordre établi. Cette position leur permet de s'enrichir et de vivre dans l'opulence. Les membres du clergé sont censés être chastes, mais nombre d'entre eux ont des maîtresses. Les prélats ne visitent que très rarement leurs diocèses et ne diffèrent guère de la noblesse en général.
Les ecclésiastiques les plus importants du Val des Bois ont été éduqués dans une des trois universités de la chrétienté (Paris, Oxford et Salamanque), mais leurs inférieurs sont très peu cultivés. Les curés locaux sont souvent fils des plus riches hommes libres ou artisans de leur village. Certains ont appris à lire et à écrire à l'école, mais le plus souvent, c'est le prêtre de la paroisse qui leur a enseigné tout ce qu'ils savent. La plupart connaissent mal la religion chrétienne, et quelques-uns n'ont même pas la possibilité de renouveler leur Bible tant ils sont pauvres. Il n'y a pas, en vérité, suffisamment de prêtres en Languedoc et certaines églises n'ont pas connu de messe depuis plus de trente ans. L'hérésie albigeoise (le catharisme) doit une partie de sa force à la faiblesse de l'Eglise.
Malgré les disparités religieuses, la dimension Divine est toujours présente. Les cathares ont beau être des hérétiques, leur ferveur religieuse est telle qu'elle crée souvent une aura Divine plus puissante que celle générée par les chrétiens orthodoxes.

LE CENTRE DU POUVOIR

Toulouse est la capitale du Languedoc. On y trouve une cathédrale, le palais de l'archevêque et le palais fortifié du comte Raymond de Saint-Gilles, qui régite le comté, plus en théorie que dans la pratique. Les nobles les plus importants du Val des Bois ont une maison à Toulouse, mais ils n'apparaissent que rarement à la cour.
Le visiteur le plus assidu et influent de la ville est l'émissaire du pape, le père Raynard de Certre, abbé d'une abbaye cistercienne d'Italie, qui se trouve être aussi une relation du Duc de Gascogne. Son obéissance aux exigences du souverain pontife est absolue.
Toulouse possède une bonne école, qui n'a pas encore été reconnue officiellement comme université, mais où des savants enseignent la théologie, le droit et la philosophie à un nombre croissant de riches étudiants. Le directeur de cet établissement est un prêtre hérétique modéré du nom de Théodore de Calais. On forme en ces lieux des hommes cultivés d'un grand intérêt pour la politique locale. Certains disent même qu'on leur fait découvrir de nouvelles écoles de pensées, pas forcément conformes aux Ecritures. Les textes classiques et musulmans qu'on y étudie encouragent en effet un mouvement rationnel.